ALL STAR WRESTLING #62
05/01/1980
L’insouciance des années 1970 cède la place au charme intemporel des années 1980, teintées de néons, d’une identité musicale et cinématographique unique et d’une explosion de la pop-culture du monde occidental. À cet égard, le catch professionnel connaît un essor significatif sur le continent américain, alors qu’il s’essouffle en Europe. Aux États-Unis, la décennie sera celle du déclin progressif des territoires de la National Wrestling Alliance, au profit de promotions régionales qui iront s’affirmer et, c’est le cas pour la World Wrestling Federation, triompher.
Vince McMahon et « Wrestling’s Living Legend » Bruno Sammartino ouvrent ce programme All Star Wrestling, toujours enregistré depuis le Hamburg Fieldhouse d’Hamburg en Pennsylvanie.
Gary Cappetta est de retour et procède aux rituelles présentations. Le catch proposé ce soir est sous le contrôle et la juridiction de la Commission d’État, représentée sur place par Jonas Quezedo. Dr. George Zahorian est en ringside, en compagnie de Mike Mittman à la cloche. Les arbitres de cette heure de catch seront John Stanley, Gilberto Roman et Dick Woehrle.
MATCH 1 : THE GREAT HUSSEIN W/FREDDIE BLASSIE VS TITO SANTANA (06:42)
VAINQUEUR : TITO SANTANA PAR DQ
PRISE DE FINITION : DÉCISION DE L’ARBITRE
INDICATEUR : ** ½
Accompagné par « Classy » Freddie Blassie, the Great Hussein of Iran est sur le ring, toujours recouvert d’un keffieh et d’une longue cape. Heel dans l’âme, Hussein est automatiquement détesté en raison des traits de son personnage, calqués sur le modèle stéréotypé d’un iranien hostile et ennemi de l’Amérique. À notre grande surprise, son opposant n’est autre que la moitié des Champions par équipe de la promotion, en la personne de Tito Santana. Ce dernier rejoint le ring sous les acclamations unilatérales du public, alors qu’une cohorte de jeunes fans l’attendent, espérant obtenir un autographe. On commence fort !
Et à cet égard, Hussein se jette sur Santana, brisant sa garde et l’étranglant avec son keffieh. Santana revient et retour de bâton oblige, étrangle à son tour Hussein en utilisant son propre foulard. Chaud comme la braise, Santana s’impose avec un tour de hanches, profitant ensuite d’une tentative ratée de saut chassé. Immobilisé au sol, Hussein reçoit une leçon de catch de la part de Tito. À nouveau debout, Hussein se laisse encore une fois surprendre par un ciseau de tête. Pris dans son élan, Santana est envoyé s’écraser de plein fouet sur le plancher du Fieldhouse. À son tour, Hussein reprend enfin la main, mais Santana le couche avec des sauts chassés. Envoyé à l’extérieur du ring, Hussein revient avec une chaise ! L’arbitre Dick Woehrle fait immédiatement sonner la cloche, voyant Santana l’emporter par disqualification. La décision est discutable, Hussein n’a en effet pas utilisé cette chaise. Toutefois, cela a le mérite de ne pas trop décrédibiliser l’iranien, tout en permettant à Santana de s’arroger une belle victoire.
MATCH 2 : KEN PATERA W/GRAND WIZARD OF WRESTLING VS BILL BERGER (05:02)
VAINQUEUR : KEN PATERA
PRISE DE FINITION : SWINGING FULL NELSON
APPRÉCIATION : BON SQUASH ET PROMO EFFICACE
Sur une pente on-ne-peut-plus ascendante, Ken Patera combat ce soir pour la première fois de l’année. Toujours floqué du Grand Wizard of Wrestling, Patera doit être aidé à retirer sa combinaison pailletée, faisant saillir sa musculature immaculée. L’ancien bodybuilder et haltérophile de renom s’oppose ce soir à Bill Berger, absolument pas de taille face à la puissance du natif de Portland dans l’Oregon.
En guise d’échauffement et en prenant tout son temps, Patera s’autorise un petit footing, enchaînant avec une série de « Jumping Jacks » ! Vanté au microphone par Sammartino, Patera est selon lui, le plus grand haltérophile de l’histoire des États-Unis, ajoutant qu’il soulève près de 410kg en squat. Quant au match, Patera pulvérise ce pauvre gars, en complète désuétude. En l’espace de cinq minutes, Patera l’emporte avec sa Swinging Full Nelson, l’arbitre faisant immédiatement sonner la cloche, sans même s’enquérir de l’état de Berger !
– Reçu au microphone par Vince McMahon, Ken Patera et son manager s’autorisent une petite promo. Faisant l’éloge de ce médaillé d’or en haltérophilie, McMahon remarque que son seul défaut est son arrogance, ce à quoi le Wizard réplique que c’est au contraire un puissant atout. Ce dernier ajoute que Patera est le meilleur poulain qu’il ait jamais eu (pensée à « Superstar » Billy Graham qui a du apprécier) et qu’il remportera la ceinture suprême en 1980. À propos d’une remarque sur son « instinct prédateur », Patera répond qu’il fait ce qu’il veut, exigeant du respect.
MATCH 3 : HULK HOGAN W/FREDDIE BLASSIE VS ANGELO GOMEZ & BEN ORTIZ (04:57)
VAINQUEUR(S) : HULK HOGAN
PRISE DE FINITION : CANADIAN BACKBREAKER
APPRÉCIATION : SQUASH IMPRESSIONNANT ET PROMO PRÉCURSEURE
À l’affiche pour la première fois en 1980, celui qu’on surnomme « the Incredible » Hulk Hogan est toujours accompagné de « Classy » Freddie Blassie. En retirant sa longue cape dorée, Hogan dévoile une musculature de titan. Annoncé de Venice Beach en Californie, Hogan se mesure ce soir à Angelo Gomez et Ben Ortiz, tous deux jobbers d’origine portoricaine, catchant respectivement de 1979 à 1984 et de 1972 à 1983.
L’image est saisissante. Hogan est un monstre de puissance et le démontre en pulvérisant purement et simplement ces pauvres gars. Avec des coups lourdement portés, Hogan s’affiche ce soir en vitrine. Gomez se fait jeter à l’extérieur du ring et c’est désormais Ortiz qui se fait punir. Hulk Hogan l’emporte en élevant Ortiz un peu laborieusement dans son Canadian Backbreaker, prise totalement impressionnante de par la stature d’Hogan.
– Triomphant, Hogan et son manager rejoignent Bruno Sammartino pour une courte interview. Inédite image que celle d’un Hogan et d’un Sammartino côte à côte. Questionné à propos des habiletés techniques de son poulain, Blassie répond qu’il n’a pas encore eu besoin de les démontrer, car aucun promoteur ne lui offre suffisamment de challenge. Hogan s’empare du microphone et s’autoproclame le nouveau roi du catch professionnel, mettant quiconque au défi de se frotter à ses pythons, métaphore qui désigne ses larges biceps.
MATCH 4 : LARRY ZBYSZKO VS JOHNNY RODZ (07:28)
VAINQUEUR : LARRY ZBYSZKO
PRISE DE FINITION : COUP DE BÉLIER
INDICATEUR : ** ¼
Unique élève de Bruno Sammartino et espoir fondé de la discipline, Larry Zbyszko est ce soir sur le ring du Fieldhouse d’Hamburg, prêt à se battre. Ce soir, Larry s’oppose à « Unpredictable » Johnny Rodz, excellent catcheur originaire de Brooklyn, dans l’État de New York et futur entraîneur de renom. L’affiche promet un bon petit match de catch comme on les aime !
Les premiers échanges sont plutôt nerveux et voient Larry passer à un cheveu de surprendre son imprévisible antagoniste avec un Sunset Flip. Rodz s’en plaint et, alors que l’arbitre s’interposait, ce dernier surgit soudainement et brise la garde de Zbyszko. Le match est prenant, chacun ajoutant son type d’intensité à une rencontre qui se construit progressivement. Rodz manque plusieurs fois l’occasion de tenter le tombé, au risque de se faire contrer et c’est ce qu’il se passe à chaque fois ! Sur un coup de tête, Rodz se sonne lui-même mais reste dans son élément, utilisant les cordes à son avantage. En tentant de porter un coup de pied, porté de la seconde corde, Rodz retombe sur les fesses, permettant à Larry d’enchaîner avec un surpassement. Sur une projection dans les cordes, une collision voit Rodz et Zbyszko se rentrer dedans de plein fouet. Ce dernier en profite alors pour faire le tombé, l’emportant sur un Johnny Rodz encore plus sonné que lui. Zbyszko s’en tire, un peu groggy, mais la tête haute.
MATCH 5 : « COWBOY » BOBBY DUNCUM W/CPT. LOU ALBANO VS RON LEE (02:39)
VAINQUEUR : BOBBY DUNCUM
PRISE DE FINITION : BULLDOG
APPRÉCIATION : SQUASH MOLLASSON DE LA PART DE DUNCUM
Concluant cette édition d’All Star Wrestling, « Cowboy » Bobby Duncum s’avance au ring et porte toujours son chapeau et son gilet en cuir. Accompagné par ce filou de Lou Albano, Duncum se frotte ce soir à Ron Lee, talent à ranger dans la catégorie « chair à canon » annoncé d’Akron dans l’Ohio.
Pour ce dernier match, la foule est plutôt énergique, se lançant d’emblée dans un chant « We Want Patterson », slogan à l’encontre d’Albano et d’un chant « Albano is a bum », ce qui donne en traduction littérale : « Albano est un gros tas ». Sur le ring, c’est plutôt fade et Duncum l’emporte en moins de trois minutes avec son Bulldog.
Pour ce premier aperçu de l’année 1980, All Star Wrestling s’offre un programme plutôt varié et rythmé. Les brutes sont de sortie : que ce soit Ken Patera comme Hulk Hogan ont laissé forte impression. Mention toute particulière à Hogan, resplendissant dans son rôle et transpirant à grosses goutes d’un immense potentiel. On ne peut que frissonner devant ce face face entre Hogan et Sammartino, icônes de leurs générations respectives. À oublier, c’est Bobby Duncum, qui en dépit d’un bon match face à Bob Backlund au Madison Square Garden, n’offre rien de bien pertinent. On peut toutefois se satisfaire d’un plutôt bon match de catch entre Larry Zbyszko et Johnny Rodz, sans encore se soucier que ce dernier est à quelques semaines de l’un des plus grands heel turns de l’histoire. Cependant, la petite pépite de cet épisode sera ce match d’ouverture entre le futur Iron Sheik et Tito Santana, première fenêtre ouverte sur les années 80, une décennie qui s’apprête à changer la face de cette industrie.
Nathan Maingneur