WORLD WRESTLING FEDERATION – MSG #12

WORLD WRESTLING FEDERATION

MADISON SQUARE GARDEN #12

23/10/1978

Madison Square Garden

Madison Square Garden

Le Madison Square Garden s’illumine de toutes parts pour faire place à l’attraction populaire et divertissante qu’est alors le catch américain. Ce soir, Bruno Sammartino effectue son retour au Garden !

Vince McMahon est notre hôte et commente ce programme d’une heure et demie. Howard Finkel, légendaire annonceur et voix mythique de notre sport-spectacle favori, s’enquiert des présentations. Finkel précise que le catch proposé ce soir sera sous l’étroite supervision de la Commission Athlétique de l’État de New York. Les juges aux abords du ring sont Harry Lewis, Michael Paige et Roger Bello, en compagnie du Dr. Harry Kleinmann et de Vincent Abbatiello à la cloche.


MATCH 1 : JOHNNY RODZ VS DEL ADAMS (09:39)

VAINQUEUR : JOHNNY RODZ

PRISE DE FINITION : BUTTERFLY SUPLEX

INDICATEUR : * ½


Pour ce premier match, Johnny Rodz est de la partie. Annoncé de New York City, celui qu’on surnomme « Unpredictable » est haï du public, jouant pourtant à domicile. « The Fire Brand from the Bronx » fait ce soir état d’une forme physique impeccable et se mesure à Del Adams, originaire de Wellington, en Nouvelle-Zélande. Derrière ce pseudonyme, on retrouve toutefois Jim Ray, jobber qu’on connaît grâce à ses apparitions à All Star Wrestling.

De par son expérience, Rodz s’impose logiquement avec ses coups d’une précision redoutable. Attention toutefois, Adams semble par moments plutôt vif et tient tête au futur entraîneur émérite. Johnny se démarque toujours par son utilisation remarquable des cordes, y prenant appui où s’élançant pour ajouter de l’impact à ses coups de pied. Quelques passages sont pertinents, ce n’est pas le cas du reste du match, sans réel enjeu. Adams s’autorise un petit retour en beauté mais sur une charge, s’écrase dans le coin. Cela permet à Rodz de l’emmener en Butterfly Suplex et de l’emporter au compte de trois.


– Au nom de la World Wide Wrestling Federation, Vince McMahon et Gorilla Monsoon remettent un chèque de 17,000 dollars à la présidente de la Juvenile Diabetes Foundation, association caritative engagée dans la lutte contre le diabète chez l’enfant. Un geste qui engage la promotion sur un chemin à la fois politique et social, celui des oeuvres caritatives. 


MATCH 2 : S.D JONES VS BARON MIKEL SCICLUNA (20:00)

VAINQUEUR : AUCUN

PRISE DE FINITION : TIME LIMIT

INDICATEUR : ** ½


S.D Jones, très apprécié du public de New York, est sur le ring et se prépare à affronter une figure détestée des foules américaines. Originaire de l’île de Malte, on pourrait, au vu de son accoutrement, lui soupçonner d’être issu de sang royal. Mikel Scicluna, qui porte fièrement sa cape rouge et son titre de baron, fait son entrée et harangue quelques spectateurs véhéments. Au premier rang est assis Chuck Wepner, célèbre figure du monde de la boxe des années 1960-1970 qui a tenu tête à Muhammed Ali lors d’un combat en 1975. Combat qui a notamment inspiré l’écriture du script de « Rocky », film désormais culte où un certain Sylvester Stallone porte à l’écran le personnage de Rocky Balboa en 1976.

Baron Mikel Scicluna

© World Wrestling Entertainment Inc. All Rights Reserved

À l’aide de tactiques comme d’habitude peu louables, le maltais prend l’avantage en collier arrière à coups de tirage de slip et de cheveux. Autrement dit : du Scicluna dans le texte. Lorsque Jones retourne la prise en Wristlock au bout de cinq minutes des plus palpitantes, la foule ne réagit pas, s’étant sans doute endormie. Jones réveille toutefois le public avec un coup de tête tonitruant ! Scicluna reprend la main en paralysant Jones au niveau des trapèzes. Debout, Jones éclate son adversaire à coups de boule, le retenant à chaque fois dans sa chute en lui tapant amicalement sur l’épaule, comme pour endormir un bébé ! Scicluna chute à plat ventre et démontre encore une fois ce soir une théâtralité exceptionnelle. On se croirait presque dans un dessin animé. Jones envoie d’autres coups de boule, mais Scicluna se dégage systématiquement. La cloche sonne, le temps limite de vingt minutes étant épuisé. Il s’agit donc d’un nul et Scicluna refuse d’entendre raison. Sans doute pas le match le plus énergique que j’ai pu voir jusqu’ici mais qui s’affiche davantage à mon opinion comme une petite exhibition de tout ce qui n’existe plus dans le catch d’aujourd’hui.


MATCH 3 : WORLD WIDE WRESTLING FEDERATION TAG TEAM TITLES MATCH : HIGH CHIEF PETER MAIVIA & CHIEF JAY STRONGBOW VS THE YUKON LUMBERJACKS © (03:04)

VAINQUEURS : THE YUKON LUMBERJACKS

PRISE DE FINITION : BIG BOOT

APPRÉCIATION : EXCELLENT RETOURNEMENT DE SITUATION


Les ceintures par équipe de la World Wide Wrestling Federation, toujours détenues par Eric et Pierre, bûcherons à la solde de ce filou de Lou Albano, sont ce soir remises en jeu. « High Chief » Peter Maivia s’associe ce soir au populaire Chief Jay Strongbow. L’équipe a de l’allure et a tout pour capturer l’or par équipe. Sauf qu’il y a un problème. Maivia s’est en effet récemment séparé de Backlund en se retournant contre lui et son manager, Arnold Skaaland, lors d’une récente confrontation à Championship Wrestling.

Des tensions surgissent immédiatement entre Maivia et Strongbow, qui hésite à commencer, remettant en cause l’absence de volonté du samoan. Au cœur d’une véritable prise de bec, le public lance des projectiles en réponse à ce non-match. Strongbow semble enfin résigné à combattre lorsque que… Maivia entre et trahit son partenaire ! Ensuite passé à tabac par les Lumberjacks sous une pluie de sifflets, Strongbow est abandonné par son coéquipier qui regagne le vestiaire, se rangeant visiblement du côté sombre du catch. Face à l’adversité, l’amérindien ne démérite pas mais succombe toutefois à un Big Boot de Pierre. Maivia a donc bel et bien tourné heel et doit maintenant répondre de ses actes, notamment auprès d’un certain Bob Backlund.


MATCH 4 : CRUSHER BLACKWELL VS TONY RUSSO (05:01)

VAINQUEUR : CRUSHER BLACKWELL

PRISE DE FINITION : BIG SPLASH

APPRÉCIATION : BELLE EXPOSITION POUR BLACKWELL QUI DÉBUTE AU GARDEN


Pour sa première apparition télévisée au Madison Square Garden, Crusher Blackwell se doit de faire forte impression. The Grand Wizard of Wrestling n’est pas à ses côtés, sans doute trop occupé à préparer Ernie Ladd pour son match de championnat. Blackwell se frotte ce soir à Tony Russo, dans ce qui s’annonce d’ores et déjà comme un squash pur et simple.

Russo se sent pousser des ailes et fait preuve d’une tentative offensive, en vain toutefois face à l’imposant Crusher Blackwell. Celui-ci réplique et l’aplatit avec une lourde descente de la cuisse. Écrasé dans le coin par un Body Avalanche, Russo subit un gros Falling Headbutt. Debout sur la première corde, Blackwell prend son élan et assène un Splash monstrueux à son adversaire, le public retenant son souffle. Crusher Blackwell l’emporte donc en laissant une puissante impression pour ses débuts au Garden.


MATCH 5 : WORLD WIDE WRESTLING FEDERATION WORLD TITLE MATCH : ERNIE LADD W/GRAND WIZARD OF WRESTLING VS BOB BACKLUND © W/ARNOLD SKAALAND (17:24)

VAINQUEUR : BOB BACKLUND

PRISE DE FINITION : ATOMIC DROP

INDICATEUR : **** ½


« Big Cat » Ernie Ladd, accompagné par the Grand Wizard of Wrestling, effectue son entrée sous une pluie de huées. Ladd a ce soir l’occasion de mettre la main sur une ceinture qu’il convoitait déjà lorsque Sammartino la détenait. Bob Backlund le rejoint, managé par le Golden Boy, Arnie Skaaland, déclenchant un tonnerre d’acclamations. Backlund est bien déterminé à conserver sa ceinture coûte que coûte et jouit à la fois d’une extrême popularité et d’une forme physique impeccable. On peut toutefois voir que le Wizard a glissé un objet en douce dans le slip de Ladd.

Premier contact et premières tentatives pour Backlund d’emmener son large adversaire au sol. Ladd se plaint auprès de l’arbitre que celui qu’on surnomme « All American Boy » s’accroche à son slip, à quelques secondes de faire pareil au Champion ! Backlund s’en prend aux fondations de son challenger, point faible du grand Ernie Ladd. Au sol, Backlund procède à une élongation de la jambe, voyant un Ladd souffrant manquer à quelques reprises d’être compté par l’arbitre. S’en sortant, Ernie demande un temps mort et veut même à nouveau serrer la main du Champion. Quel culot ! Ladd s’empare alors de son objet illicite et l’encastre dans la gorge du Champion. L’arbitre se doute de quelque chose mais « Big Cat » enfume son monde, s’illustrant par un comportement de heel proche de la perfection. Utilisant encore et encore son objet, Ladd passe tout près de l’emporter, si ce n’est pour ses pieds, allègrement posés sur les cordes. Porté par une foule entièrement supportrice, Backlund entame son retour, seulement pour être stoppé par un Big Boot du challenger. Ce dernier Leapfrog ensuite une projection de Backlund (imaginez-vous juste cet athlète de plus de deux mètres exécuter cette manœuvre) et lui assène un saut chassé, mais le Champion se dégage in-extremis ! Ce dernier esquive un Splash du Big Cat et ça y est ! La foule se lève alors que Backlund hisse l’imposant Ladd dans son Atomic Drop et on ne s’entend plus ! 1…2… et 3 ! Bob Backlund, ce soir en David, a défié l’adversité face au Goliath, en la personne d’Ernie Ladd, au terme d’une superbe rencontre à inscrire dans les annales des grandes défenses de titres de catch de l’histoire du Madison Square Garden.


MATCH 6 : « SUPERSTAR » BILLY GRAHAM VS BRUNO SAMMARTINO (12:24)

VAINQUEUR : BRUNO SAMMARTINO

PRISE DE FINITION : DÉCISION DE L’ARBITRE

INDICATEUR : ***


C’est l’heure de notre Main Event. « Superstar » Billy Graham affiche une musculature démente. Depuis sa défaite face à Backlund l’an dernier, Graham a souffert d’une importante perte de momentum, s’effaçant presque totalement des programmes de la World Wide Wrestling Federation. Son adversaire effectue ce soir son grand retour au Madison Square Garden et n’est autre que Bruno Sammartino, déjà porté au rang de légende vivante de l’industrie. L’accueil est significatif et l’italien n’a pas oublié sa tumultueuse histoire avec Graham et compte ce soir régler ses comptes, une fois pour toutes. L’enjeu du match réside également dans cette interrogation, présente sur toutes les lèvres : Bruno Sammartino est-il toujours le même homme qu’avant son départ ?

Bruno Sammartino, Arnold Skaaland & Bob Backlund

© World Wrestling Entertainment Inc. All Rights Reserved/Courtesy of Pro Wrestling Illustrated

Quelle image que celle d’un Graham et d’un Sammartino, prêts à s’échanger ce premier contact. « Superstar » rend honneur à son surnom et demande au photographe d’obtenir le meilleur cliché possible. Bruno s’empare du cou de Graham en Full Nelson et ce dernier n’a d’autre alternative que de se réfugier dans les cordes. Un test de force voit Graham capituler, non sans résistance face à la force de l’italien. Celui-ci subit ensuite de lourdes projections dans le coin, suivi d’une prise de l’ours de Graham. Bruno retourne la prise à son avantage, manœuvre classique des grandes heures de « Living Legend ». Sur le tablier du ring, Graham est écrasé tête première dans l’armature métallique d’un des coins. Ouvert au front, Graham est en détresse et Bruno vise cette lacération avec des coups de poing. Le public est debout, réveillé par ce retournement de situation. L’arbitre est en panique et choisit d’arrêter le match à cause de la coupure de Graham. De sa plus belle annonce, l’immortel Howard Finkel déclare que Sammartino ressort victorieux de ce match, clôturant ce programme de la meilleure des manières.


Agréablement aménagée à une heure et demie, cette carte qui se tenait au Madison Square Garden est sans doute l’une des meilleures que j’ai pu voir jusqu’à ce jour. On passe outre ces quelques matches préliminaires, S.D Jones et Scicluna nous offrant toutefois quelques moments sympathiques. S’il fallait un squash, quel meilleur exemple que Crusher Blackwell ? Terrorisant les vestiaires de la World Wide Wrestling Federation depuis son retour, l’imposant Blackwell aura imposé sa marque sur la plus grande scène de toutes. Ce programme est également le théâtre du heel turn d’une figure autrefois extrêmement appréciée, en la personne de Peter Maivia. S’étant déjà retourné contre Bob Backlund, c’est ce soir Chief Jay Strongbow qui reste sur le carreau, Maivia se rangeant définitivement du côté heel de la force. Affaire à suivre de très près. Synonyme du grand retour de Bruno Sammartino, cet événement était d’ailleurs sans doute à guichets fermés, près de 22 000 personnes se massaient ce soir dans les gradins du Garden. Rien d’inhabituel donc, compte tenu de la présence de l’italien. L’attraction de la soirée réside toutefois à mon opinion dans cette superbe défense de titre d’un Backlund héroïque et immensément populaire. Ernie Ladd n’a pas à rougir, inscrivant ici l’une des plus belles performances de sa carrière. Formidable exhibition donc de ce qu’est le produit World Wide Wrestling Federation à cette richissime époque qu’est la fin des années 1970 et l’entrée progressive dans l’âge d’or du catch, caractérisé par les années 1980. Je souhaite humblement dédier cet article à la mémoire de Howard Finkel, qui a nous a quittés il y a quelques jours et dont l’inimitable timbre de voix résonne encore certainement dans les travées du Madison Square Garden. Reposez en paix, Monsieur Howard Finkel. 

Howard Finkel

© World Wrestling Entertainment Inc. All Rights Reserved

Nathan Maingneur

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