ALL STAR WRESTLING #63
12/01/1980
Ce programme s’ouvre au Agricultural Hall d’Allentown en Pennsylvanie, pour un épisode de Championship Wrestling, en date du 12 janvier 1980. Vince McMahon et Bruno Sammartino nous accueillent et nous présentent la carte de cette émission. Toutefois, nous retrouverons l’ambiance du Fieldhouse d’Hamburg propre à All Star Wrestling un peu plus tard dans la soirée.
Joe McHugh s’occupe des présentations sérotinales et stipule que le catch proposé ce soir est sous la juridiction et le contrôle de la Commission d’État. Dr. George Zahorian est en compagnie de Mike Mittman à la cloche, tandis que nos arbitres seront John Stanley, Gilberto Roman et Dick Kroll.
MATCH 1 : LARRY ZBYSZKO VS JOJO ANDREWS (03:44)
VAINQUEUR : LARRY ZBYSZKO
PRISE DE FINITION : BOSTON CRAB
APPRÉCIATION : MATCH PASSABLE MAIS PROMO D’APRÈS-MATCH FONDAMENTALE
Dans l’enceinte du Agricultural Hall d’Allentown, on peut déjà se rendre compte que le public est plus compact qu’au Fieldhouse d’Hamburg. Larry Zbyszko, originaire de Pittsburgh en Pennsylvanie, est ce soir en action. De retour d’un séjour au Japon en 1979, Larry s’est physiquement affuté et affiche désormais un catch plus acéré. Ce soir, le prodigieux élève de Bruno Sammartino se mesure à JoJo Andrews, qu’on connaît bien plus en tant que Kasavubu, tête d’affiche des belles heures de la Stampede Wrestling de Calgary.
Depuis son retour, Zbyszko est présenté comme un fin technicien, peut-être même le plus rôdé à cet égard. Dans le respect des règles, Larry repousse les tentatives de contact d’Andrews, qui peine à rester accroché à ce prodige qu’est Zbyszko. C’est plutôt court, l’œil est plutôt captivé par ce qu’il se passe en arrière-plan, dans le public où certains spectateurs semblent s’agiter. Profitant d’un saut chassé raté, Larry l’emporte ensuite en retournant Andrews dans un Boston Crab, celui-ci jetant l’éponge après quelques secondes à l’agonie.
– Reçu au microphone par Vince McMahon, Larry Zbyszko semble plutôt réservé. D’emblée, McMahon aborde son récent comportement vis-à-vis de Bruno Sammartino. Pour Larry, le catch professionnel représente tout et son désir brûlant est de s’élever parmi les meilleurs de ce sport. Pour autant, être l’élève de Sammartino est pour lui un frein qu’il ne supporte plus. Posément, calmement et respectueusement, Larry Zbyszko pose ici les fondements de ce que sera l’un des plus grands « Heel Turns » de l’histoire du catch. Il met son maître au défi, celui de se mesurer à lui dans un combat de catch, qui plus est, en tenant à ce que ce combat soit diffusé, pour que le monde soit témoin de sa réussite, celle de sortir de l’ombre de son mentor.
Cette fois-ci de retour au Fieldhouse d’Hamburg en Pennsylvanie, nous sommes bel et bien dans cet épisode d’All Star Wrestling, diffusé le même jour que ce Championship Wrestling.
MATCH 2 : THE SAMOANS W/CPT. LOU ALBANO VS DOMINIC DENUCCI & STEVE KING (06:53)
VAINQUEURS : THE SAMOANS
PRISE DE FINITION : SAMOAN DROP
APPRÉCIATION : LES SAMOANS ONT FAIM ET RESTENT INVAINCUS
Accompagnés par un Captain’ Lou Albano torse nu, qui se remet apparemment en forme, Afa et Sika s’avancent en direction du ring, suscitant toujours crainte et stupeur de la part des spectateurs. Ils ne parlent qu’en s’invectivant avec des cris et représentent une menace sérieuse pour l’or par équipe de Tito Santana et d’Ivan Putski. Face à ces sauvages, on retrouve une association fortuite, composée de Dominic DeNucci, vétérans des rings d’origine italienne et de Steve King, catcheur qui officie sur ce territoire entre 1976 et 1983.
Dominic débute et tient tête à Afa et ses effrayantes expressions faciales. Malgré son expérience certaine, DeNucci est rapidement mis en difficulté dans le mauvais coin, subissant l’agressivité des samoans. Aux commentaires, McMahon demande à Sammartino ce qu’il pense des propos tenus par son élève. Celui-ci se dit attristé et ne consent pas à accepter son défi, considérant Larry Zbyszko comme son propre frère. Sur le ring, King ne peut rien faire et repasse le relais à Dominic, qui entre et qui veut faire le ménage. L’italien est plutôt chaud mais se retrouve à nouveau pris sous les coups de ses puissants tortionnaires. De retour à King et l’affaire est pliée avec un Samoan Drop, porté au milieu du ring par Afa. Ceux qu’on n’appelle pas encore « Wild Samoans » sont donc toujours invaincus, au grand bonheur d’un Lou Albano aux anges.
– De retour sur ce territoire pour la première fois depuis 1972, René Goulet est reçu par Vince McMahon pour un court entretien. Ancien co-détenteur des ceintures par équipe de la promotion avec Karl Gotch, Goulet est un catcheur franco-canadien originaire de Québec. Ici, Goulet discute de son récent parcours, du Japon en passant par l’Europe et la France. Ce qu’il ne mentionne pas, c’est qu’il s’est également illustré sur les rings américains de l’AWA, de la Georgia Championship Wrestling et de Mid-Atlantic Wrestling. Goulet et McMahon discutent du style de catch à l’européenne alors que « The n°1 Frenchman » aimerait se mesurer à des athlètes tels que Bruno Sammartino ou Hulk Hogan. McMahon mentionne André le Géant, dont Goulet se dit plutôt proche, en remerciant ensuite ses fans, en français s’il vous plaît !
MATCH 3 : RENÉ GOULET VS JOHNNY RODZ (06:36)
VAINQUEUR : RENÉ GOULET
PRISE DE FINITION : GUTWRENCH SUPLEX
INDICATEUR : * ¾
« Unpredictable » Johnny Rodz est ce soir en action, lui qu’on apprécie tant pour son catch acéré et son tempérament sulfureux. Ce soir sur l’antenne de ce All Star Wrestling, René Goulet s’autorise un retour sur les rings de la World Wrestling Federation, à près de cinquante ans au compteur. Catcheur d’origine québécoise, René Goulet commence sa carrière en 1957, catchant pour des promotions régionales au Canada et aux États-Unis. En 1971, Goulet remporte les ceintures par équipe de la World Wrestling Federation avec le légendaire Karl Gotch. Au cours des années 1970, Goulet s’illustre sur quelques territoires de la National Wrestling Alliance, cités plus haut, jusqu’à son retour en ce début d’année 1980.
D’emblée, Goulet se laisse surprendre par l’impulsivité de son antagoniste. Goulet sait répondre et bloque Rodz au sol, avec une clé de bras. Un saut chassé couche Johnny Rodz, mais ce dernier revient avec de sales coups de pied, portés à l’aide des cordes. Goulet est en difficulté, subissant ensuite une souplesse arrière. Se retirant in-extremis d’une descente de la cuisse, Goulet s’en sort et l’emporte avec une Gutwrench Suplex, qui suffit pour le compte de trois. René Goulet s’arroge donc une victoire pour son retour, malgré un style et un rythme quelque peu vieillissants. Goulet restera actif jusqu’à sa retraite des rings en 1987. Toutefois, René Goulet poursuivra sa carrière en tant qu’agent en coulisses, intervenant à de multiples reprises pour séparer deux protagonistes et ce, jusqu’en 1997. Goulet fut notamment le premier à battre Ric Flair sur un ring de catch et fut de la partie pour le tout premier match de la World Wrestling Federation sur USA Network, face à Tito Santana.
MATCH 4 : TITO SANTANA VS JOSÉ ESTRADA (05:06)
VAINQUEUR : TITO SANTANA
PRISE DE FINITION : FLYING BODY PRESS
INDICATEUR : * ¾
Ancien partenaire de Johnny Rodz, José Estrada se tient sur le ring du Fieldhouse d’Hamburg. Cet ancien détenteur du Junior Heavyweight Championship, concédé à Tatsumi Fujinami en 1978, s’illustre sur ce territoire jusqu’en 1983, s’exportant ensuite du côté de Porto Rico et de la World Wrestling Council de Carlos Colõn. Ce soir, l’autre protagoniste de ce combat est l’actuel co-détenteur des ceintures par équipe de la promotion et n’est autre que Tito Santana, annoncé de Mexico City, Mexico.
Immédiatement, Estrada se focalise sur la jambe gauche de Santana, l’estropiant dans l’un des coins, sans que l’arbitre Gilberto Roman ne sache comment s’interposer. Tito revient et les mouches ont changé d’âne. C’est désormais Santana qui s’en prends à la jambe gauche de son antagoniste, lui décochant de gros coup de poing au visage. Faisant preuve d’un tempérament toujours si explosif, Santana l’emporte en cinq minutes avec un Flying Body Press, s’arrogeant une petite victoire en solo.
MATCH 5 : « COWBOY » BOBBY DUNCUM W/CPT. LOU ALBANO VS ANGELO GOMEZ (03:05)
VAINQUEUR : BOBBY DUNCUM
PRISE DE FINITION : BULLDOG
APPRÉCIATION : LES SQUASHES DE DUNCUM SE RESSEMBLENT TOUS
On conclut à nouveau avec « Cowboy » Bobby Duncum, à quelques jours d’un re-match face à Bob Backlund au Spectrum de Philadelphie. Duncum est escorté par un Lou Albano tout sourire. Ce soir, son souffre-douleur attitré sera Angelo Gomez, catcheur d’origine portoricaine qui signe quelques autographes.
Tel un prédateur, Duncum se jette sur le cou de son adversaire, réduit en quelques secondes à une poupée de chiffon. Aux commentaires, Vince revient une fois de plus sur l’affaire Larry Zbyszko. À cet égard, Sammartino est toujours sous le choc de ces déclarations et préfère couper court à la discussion. Sur le ring, Duncum l’emporte en trois courtes minutes avec son Bulldog, comme d’habitude.
D’allure plutôt classique, cet épisode d’All Star Wrestling possède toutefois une particularité singulière, non-négligeable. Beau parcours pour Afa et Sika qui restent invaincus, formant de solides prétendants à l’or Tag Team d’Ivan Putski et de Tito Santana. En parlant de ce dernier, Santana catchait ce soir en solo et c’est toujours un plaisir de que de voir évoluer un tel athlète. Rebelote pour Bobby Duncum qui s’offre le même match à sens unique depuis des semaines, sans pour autant nous intéresser. Cet épisode aurait pu être celui du retour de René Goulet, après près de huit ans passés sur les rings du monde entier. Toutefois, cet épisode est prioritairement celui de la construction de l’un de plus grands volte-face de l’histoire du catch professionnel. Changé depuis son retour, Larry Zbyszko s’exprime pour la première fois, nous faisant part d’une réflexion aussi troublante que préméditée, qui cache une montagne de remords, de regrets et d’amertume et peut-être même de haine, une haine viscérale, fruit d’années passées dans l’ombre de son mentor. Un attentat se fomente contre Bruno Sammartino et celui-ci est encore loin de se l’imaginer.
Nathan Maingneur