ALL STAR WRESTLING #71
29/03/1980
Vince McMahon et « Wrestling’s Living Legend » Bruno Sammartino sont nos hôtes et nous présentent la carte de ce programme All Star Wrestling, enregistré au Fieldhouse d’Hamburg en Pennsylvanie.
Gary Cappetta s’occupe des traditionnelles présentations et stipule que le catch proposé ce soir sera sous le contrôle et la juridiction de la Commission d’État, représentée sur place par l’un de ses officiels. Dr. Fred Heinbach remplace cette semaine John Woods et siège en compagnie de Mike Mittman, notre gardien de la cloche. Les arbitres de cette heure de catch nord-américain seront Gilberto Roman et John Stanley.
MATCH 1 : DOMINIC DENUCCI & RENÉ GOULET VS DAVEY O’HANNON & JOSÉ ESTRADA (09:13)
VAINQUEURS : DOMINIC DENUCCI & RENÉ GOULET
PRISE DE FINITION : SAUT CHASSÉ
INDICATEUR : **
Vétérans des rings du monde entier et briscards dans l’âme, Dominic DeNucci et René Goulet ont en effet un certain bagage, acquis au cours des années de leurs longues carrières. Ce soir, Goulet et DeNucci s’associent pour la première fois, formant un tandem plutôt apprécié du public d’Hamburg. Face à eux se dressent José Estrada et Davey O’Hannon, annoncé par Cappetta en tant qu’ancien « Brass Knuckles Champion » de l’État du Texas. Et pourquoi pas.
Commençant face à O’Hannon, Dominic est fidèle à lui-même et s’amuse à lui mettre quelques gifles, déclenchant des éclats de rire du public. À près de cinquante ans au compteur, DeNucci sait encore s’affirmer comme à la belle époque, mettant au pied l’irlandais et le portoricain. On retrouve ici l’aspect « Comedy Wrestling » assez typique des matches de Dominic DeNucci. Goulet peut entrer et poursuivre dans le même registre, oscillant entre catch à l’ancienne et un catch plutôt comique. Toutefois, l’ancien partenaire de Karl Gotch est pris à revers et isolé dans le mauvais coin. Entre alors José Estrada, qui malgré un booking souvent perdant, n’en reste pas moins excellent entre les cordes. En difficulté, Goulet parvient toutefois à passer le relais à un Dominic DeNucci chaud bouillant, porté par l’appui d’une foule toute acquise à sa cause. Sur une catapulte, l’italien projette O’Hannon sur Goulet, qui le réceptionne avec un coup de poing. À cet égard et comme le ferait un Pete Doherty, Davey donne ce soir de sa personne pour mettre en relief le catch de ses antagonistes, quitte à en perdre la face. Sur le ring, Estrada est projeté vers Goulet et se mange ses pieds en pleine face, permettant à Dominic de faire le tombé et de l’emporter au compte de trois. Première victoire pour ce duo de choc qui semble plaire au public. C’est déjà bon signe.
MATCH 2 : TOR KAMATA W/FREDDIE BLASSIE VS BIMBO LARSON (05:17)
VAINQUEUR : TOR KAMATA
PRISE DE FINITION : TOP ROPE SPLASH
APPRÉCIATION : SQUASH CORRECT ET FIN DE MATCH IMPRESSIONNANTE
Originaire de l’île d’Hawaï et résidant au Canada, Tor Kamata est un personnage plus qu’un réel athlète, à ranger dans la même catégorie qu’un Abdullah the Butcher ou qu’un King Curtis Laukea, s’inspirant tous trois du Sheik Originel. Figure du catch sanglant des années 1970, Kamata terrorise les rings du monde entier depuis 1965. Ce soir managé par « Classy » Freddie Blassie, Tor Kamata effectue en 1980 un bref retour à la World Wrestling Federation, s’y étant déjà illustré entre 1976 et 1977. Ce soir, l’imposant Kamata se mesure à un certain Bimbo Larson, plus connu pour sa présence en coulisses et sur la route. En effet, celui qu’on appelle d’habitude Pinky Larson fut recruté par Gorilla Monsoon au début des années 1970 pour monter et démonter les rings.
Ce pauvre Larson ne fait malheureusement pas le poids face au catch brutal de Kamata, se retrouvant rapidement à morfler. Comme les noms cités plus haut, Kamata utilise la peur qu’il peut susciter comme un atout certain, en profitant pour camoufler quelques défaillances sur le plan technique. Tout en restant (plus ou moins) dans les règles, Kamata griffe, mord et étrangle ce pauvre Bimbo, qui ne peut absolument rien faire. Sous les ordres de Freddie Blassie, Kamata monte sur les cordes et s’élance pour un énorme Splash. C’est terminé pour Larson qui n’aurait pu se relever d’un compte de cent. Un brancard de fortune est dépêché par quelques arbitres et officiels, sans quoi Larson n’aurait pu être sorti du ring. Sauf que Kamata n’en a pas terminé et agresse à nouveau cet homme, désormais sans défense. Montant à nouveau sur les cordes, Tor Kamata s’élance pour un second Splash, totalement destructeur. Pour une première impression sur cette antenne, c’est réussi.
– Reçu au microphone par Bruno Sammartino, Ernie Roth s’est amené avec l’un de ses plus fiers protégés, en la personne de Ken Patera. D’emblée, celui qu’on connaît si bien en tant que Grand Wizard of Wrestling dévoile les intentions de son poulain, qui sont de s’arroger l’or Intercontinental et l’or suprême de la promotion. Lorsque Sammartino mentionne le nom de Pat Patterson, Roth s’enrage et le fustige, le traitant de traître. Quant à Ivan Putski, que Patera compte battre, notre sorcier du ring le qualifie de « Polish Joke » ! Patera prend la parole et compte bien se mesurer à des noms tels que Patterson ou Putski, mais son objectif principal est d’affronter Bob Backlund, rappelant à cet égard qu’il est toujours invaincu en solo, sauf face à un seul homme, celui qui tient le microphone. Beau geste de respect de la part d’un heel comme Patera, qui sait reconnaître la grandeur d’une telle légende.
MATCH 3 : ANDRÉ LE GÉANT VS BARON MIKEL SCICLUNA & JOHNNY RODZ (05:12)
VAINQUEUR(S) : ANDRÉ LE GÉANT
PRISE DE FINITION : SIT OUT SPLASH
APPRÉCIATION : DIVERTISSEMENT ASSURÉ AVEC ANDRÉ
C’est sans conteste l’attraction de la soirée. Vétéran des rings, le Baron Scicluna s’associe ce soir à « Fire Brand from the Bronx » Johnny Rodz. Le tout forme un tandem de circonstances plutôt intéressant. Hommes, femmes et enfants se lèvent à l’unisson pour l’accueil d’André le Géant, véritable montagne humaine, annoncée de Grenoble dans les Alpes Françaises. Qu’on se le dise, André est et reste une attraction hors du commun.
Fourbes et calculateurs, Johnny et Scicluna tentent vainement de prendre André de court, qui en impose de sa présence. En effet, le Géant Ferré paraît plus grand encore sur le petit ring du Hamburg Fieldhouse. Le Baron tente le tout pour le tout mais se fait sécher par un coup de tête du tonnerre. Changement de tactique : Scicluna et Rodz s’y mettent ensemble et s’en prennent aux fondations du géant, sans succès. André s’amuse et les hisse pour une double prise de l’ours. En les relâchant, Scicluna s’écroule, inerte, sur le corps de Johnny Rodz, alors que McMahon est hilare ! Projeté à l’extérieur du ring, Rodz ne peut qu’assister impuissant à la mise à mort du Baron, écrasé sous un Sit Out Splash d’André. C’est la défaite pour Scicluna et « Unpredictable » Johnny Rodz qui n’auront simplement pas pu. En revanche, c’est toujours un plaisir que de pouvoir découvrir notre fierté nationale à un tel niveau physique, encore relativement peu embêté par ses problèmes de santé, qui réduiront considérablement sa mobilité à la fin des années 1980.
MATCH 4 : KEN PATERA W/GRAND WIZARD OF WRESTLING VS ANGELO GOMEZ (05:23)
VAINQUEUR : KEN PATERA
PRISE DE FINITION : SWINGING FULL NELSON
APPRÉCIATION : PATERA EST ULTRA DOMINANT
Accompagné d’un Grand Wizard of Wrestling tout d’or vêtu, Ken Patera semble ce soir s’être inspiré de la garde robe de son manager coloré. Portant une ample combinaison bleue pailletée, brodée des anneaux olympiques, Patera en impose. Ce soir, l’ancien haltérophile se mesure à Angelo Gomez, absolument pas de taille. À noter qu’Ernie Roth joue encore ce rôle de valet de ring, aidant Patera à retirer sa tenue, sous les sifflets moqueurs du public.
Étonnement, Patera se la joue technique, immobilisant Gomez au sol avec un collier arrière, le maintenant ensuite avec une clé de bras. Rapidement rendu impuissant, ce pauvre Angelo Gomez se fait promener par la force de l’homme fort, titulaire de plusieurs médailles olympiques. Comme à l’entraînement, Patera s’amuse, relevant à chaque fois l’épaule du corps inerte de Gomez. Un énorme enfourchement ne lui suffit pas, Patera préfère l’emporter avec sa redoutable Swinging Full Nelson, faisant tournoyer son antagoniste en le tenant par la nuque. Patera s’arroge donc une victoire de plus alors qu’il semble de plus en plus toucher du doigt une future confrontation, soit avec Pat Patterson, soit avec Bob Backlund.
MATCH 5 : « THE INCREDIBLE » HULK HOGAN W/FREDDIE BLASSIE VS STEVE KING (02:55)
VAINQUEUR : HULK HOGAN
PRISE DE FINITION : PRISE DE L’OURS
APPRÉCIATION : SQUASH HABITUEL D’HOGAN QUI RESTE INVINCIBLE
C’est presque devenu une habitude. On conclut ce programme All Star Wrestling avec la présence de « The Incredible » Hulk Hogan, ce soir vêtu d’une éloquente cape colorée qu’il portait déjà face à Tito Santana au Madison Square Garden. Toujours accompagné de « Classy » Freddie Blassie, Hogan rencontre ce soir Steve King, qui disons-le nous, n’a aucune chance.
À l’instar de Patera, Hogan essaie de se la jouer technique, préférant d’abord emmener King au sol plutôt de commencer par l’habituel martelage. Ça ne dure pas, Hogan se ralliant rapidement à sa puissance titanesque. Dans les mains d’Hogan, ce pauvre King n’est qu’un souffre-douleur. Gardant sa descente de la cuisse pour plus tard, Hogan l’emporte en moins de trois minutes avec une redoutable prise de l’ours, encore plus compte-tenu de la largeur de ses bras.
Quelques jours après une représentation au Madison Square Garden, la World Wrestling Federation se devait de rester dans cette continuité. Premier point notable : que ce fut agréable d’entendre réagir la foule d’Hamburg, d’habitude plus réservée et silencieuse que celle d’Allentown. Comme souvent lors de ces programmes, les brutes étaient de sortie. À cet égard, on peut souligner la domination d’Hulk Hogan et plus particulièrement de Ken Patera, dont les motivations semblent désormais très claires. Petit plus non négligeable, ce fut la présence de Tor Kamata, apparaissant rarement sur cette antenne. Auteur d’un véritable massacre atypique et brutal, hérité d’un style issu de l’influence du Sheik Originel, repris et popularisé au cours des années 1980 par des bouchers comme King Curtis et Abdullah the Butcher. À 98 ans cumulés, Dominic DeNucci et René Goulet semblent vouloir s’offrir une cure de jouvence en s’associant ce soir en équipe. Il est vrai que la division par équipe s’était quelque peu essoufflée depuis 1978-1979, c’est donc un bonus plus qu’un malus. Même s’ils n’ont plus réellement l’étoffe d’une équipe de champions, nous ne sommes pas à l’abri d’une surprise. Toutefois, l’attraction majeure de ce programme est à mettre au crédit de la plus grosse attraction du circuit de l’époque. De par sa simple présence, André le Géant faisait et fait toujours de cet épisode un must-see pour n’importe quel fan de catch.
Nathan Maingneur