CHAMPIONSHIP WRESTLING #38
22/11/1980
Vince McMahon et Pat Patterson sont nos hôtes de toujours et nous accueillent – une fois n’est pas coutume – dans l’enceinte du Agricultural Hall de la petite bourgade d’Allentown en Pennsylvanie pour ce Championship Wrestling, l’émission télé hebdomadaire phare de la World Wrestling Federation. Au programme ce soir, un match d’Ernie Ladd, la présence de Stan Hansen et plus encore.
L’annonceur qui remplace ce soir Joe McHugh procède aux introductions rituelles et nous indique que cette heure de catch est placée sous la juridiction de la Commission Athlétique de Pennsylvanie, présidée par J.J Binds et représentée en ringside par quelques-uns de ses officiels. Dr. George Zahorian siège en compagnie de Mike Mittman, notre gardien de la cloche. Les arbitres qui officieront ce soir sont messieurs Tony Altimore, Gilberto Roman et Dick Woehrle.
MATCH 1 : « THE BIG CAT » ERNIE LADD W/GRAND WIZARD OF WRESTLING VS JOSÉ ESTRADA (05:29)
VAINQUEUR : ERNIE LADD
PRISE DE FINITION : DESCENTE DE LA CUISSE
INDICATEUR : * ½
D’ascendance portoricaine et originaire de Brooklyn dans l’État de New York, José Estrada est l’un des lutteurs les plus complets de cette promotion. Malheureusement, son plein potentiel n’est pas exploité correctement, on préfère lui faire jouer le paillasson à taille humaine. Et c’est bien dommage, car le protégé de Johnny Rodz est l’un des tous meilleurs. Copieusement sifflé dès son arrivée, l’individu qu’il affronte ce soir se ramène aux côtés du Grand Wizard of Wrestling et n’est autre qu’Ernie Ladd, de retour sur ce territoire après un passage remarqué du côté de l’AJPW.
D’habitude cantonné au rôle du méchant, Estrada se trouve donc du côté de la foule et ce changement n’est pas pour me déplaire. Auguste, le « Big Cat » se fait désirer et met un temps fou à engager le combat. Plus agile que le grand Ladd et ses 2 mètres 06, Estrada lui court entre les jambes mais lorsqu’il se fait attraper, c’est fini pour lui. Ernie le balance d’un bout à l’autre du ring et Estrada n’est plus qu’une poupée de chiffon dans les bras d’un Ladd qui paraît vraiment gigantesque. Et ce Chokeslam porté à bout de bras ne me fera pas dire le contraire. Ernie Ladd s’amuse encore un peu avec lui et l’emporte en un peu plus de cinq minutes à la suite d’une grosse descente de la cuisse. Solide performance.
MATCH 2 : KILLER KHAN W/FREDDIE BLASSIE VS « QUICKDRAW » RICKY MCGRAW (03:07)
VAINQUEUR : KILLER KHAN
PRISE DE FINITION : COUNT OUT
INDICATEUR : * ¾
Jeune homme vaillant et toujours téméraire, Ricky McGraw est l’un des catcheurs les plus appréciés du public d’Allentown. Et tout comme José Estrada, lui aussi est souvent relégué à des seconds rôles qui ne reflètent pas son réel potentiel. Celui qu’on surnomme « Quickdraw » Rick McGraw rencontrait ce soir un gros poisson, en la personne du terrifiant Killer Khan. Dégoté par « Classy » Freddie Blassie lors d’un voyage en Orient, aux confins des contrées désertiques de la Mongolie et ramené aux États-Unis, Khan est emmené en direction du ring par son manager, qui se fait alpaguer par McMahon au sujet des récents agissements de son poulain, que Blassie défend bec et ongles.
Tout feu tout flamme, McGraw prend un avantage temporaire mais plie rapidement sous le poids des coups du mongol. Ce dernier fait preuve d’une violence terrifiante et fracasse McGraw à coups de pied et de genou. Courageux, Ricky ne se démonte pas et couche Khan avec un joli saut chassé. Mais Khan est bien trop brutal et l’anéantit avec sa descente du genou. Sous les ordres de Blassie, Khan lui relève volontairement les épaules du tapis, laissant ce pauvre McGraw choir en dehors du ring. Là, sur le sol froid et impardonnable du Agricultural Hall, Khan lui assène une terrible série de descentes du genou dont McGraw ne se relèvera pas. Compté à dix par l’arbitre, Ricky semble être blessé et doit recevoir l’aide d’autres officiels et du médecin, mais Khan décide d’en remettre une couche alors qu’un brancard était dépêché, Tony Atlas étant aussi venu s’enquérir de l’état de santé de ce pauvre garçon.
– Un vieux match opposant Ivan Putski et JoJo Andrews, dont la captation remonte au mois de février 1980 et issue d’une session d’enregistrements de Championship Wrestling, nous est rediffusée. Putski l’emportait sans surprises avec son Polish Hammer, alors que Bruno Sammartino commentait encore en compagnie de Vince McMahon.
MATCH 3 : SGT. SLAUGHTER W/GRAND WIZARD OF WRESTLING VS GENE CRESPO (06:09)
VAINQUEUR : SGT. SLAUGHTER
PRISE DE FINITION : COBRA CLUTCH
APPRÉCIATION : SQUASH PLUTÔT LONGUET DU SERGENT
Les brutes sont décidément de sortie. Après Ernie Ladd et Killer Khan, c’est au tour du Sgt. Slaughter de passer à table. Chapeau d’instructeur vissé sur la tête et le sifflet en bouche, l’ancien mâton du camp d’entraînement de Parris Island en Caroline du Sud apparaît ce soir flanqué de son manager de toujours, le Grand Wizard of Wrestling. Il s’échauffait ce soir contre un jobber du nom de Gene Crespo.
Pour un gros gabarit, Slaughter fait preuve d’une technicité plutôt improbable, n’en déplaise au Champion du monde. Mais lorsque Slaughter décide de cogner, les coups portés sont d’une violence rare. Traité comme un crash-test dummy, ce pauvre Crespo ne peut rien faire et subit le catch du sergent, qui semble y aller avec tout son arsenal. Slaughter nous gratifie même d’une sorte de Powerbomb, porté directement contre le coin, une variation de cette prise que je n’avais encore jamais vue. Slaughter joue avec le corps de son adversaire inerte et fait durer son plaisir, peut-être un peu trop longtemps. Il en termine toutefois avec son Cobra Clutch, prise de soumission létale dont personne ne s’est encore sortie.
MATCH 4 : « M. USA » TONY ATLAS VS SYLVANO SOUSA (04:16)
VAINQUEUR : TONY ATLAS
PRISE DE FINITION : SPLASH
APPRÉCIATION : PERFORMANCE D’ATLAS PLUTÔT QUELCONQUE
Physique de dieu grec – pas un pet de gras, que du muscle – Tony Atlas est quelque peu en perte de vitesse à la suite de sa défaite face à Ken Patera au Showdown at Shea. Sur l’herbe du Shea Stadium, là où les Beatles firent leur entrée mythique en 1962, Atlas manqua de peu d’emporter l’or. Pour autant, celui qu’on surnomme « M. USA » reste encore très populaire et affronte ce soir Sylvano Sousa, jobber de luxe un peu grassouillet dont le physique détonne – et c’est peu dire – avec celui d’Atlas.
À demi-mesure, Atlas s’impose sans trop de difficulté face à un gaillard qui est bien censé lui rendre ce service. Rien de bien intéressant, Atlas nous offre un joli saut chassé mais ne semble pour autant pas rentrer dans son match, les jambes un peu coupées par le rythme d’une rencontre mollassonne. Atlas se redonne du poil de la bête avec de bons coups de poing et le hisse quand même dans les airs à bouts de bras, pour mieux l’abattre avec un Military Press Slam impressionnant. Galvanisé par cet effort, Tony Atlas a du mal à cacher son sourire et conclut avec un Splash pour la victoire. Fin de match sympathique.
MATCH 5 : DOMINIC DENUCCI VS « UNPREDICTABLE » JOHNNY RODZ (04:11)
VAINQUEUR : DOMINIC DENUCCI
PRISE DE FINITION : PETIT PAQUET
INDICATEUR : * ¾
Trêve de brutes épaisses sans vergogne (pour l’instant) ou encore de jeunes prodiges au physique immaculé, place à un combat de vrais briscards. Des vieux loubards des rings qui se connaissent comme pas deux et qui trouveront toujours une occasion de se tirer la bourre. On l’a vu arriver à la conclusion du précédent combat, Dominic DeNucci est toujours très fier de combattre dans son État d’accueil. Originaire de Venise en Italie, DeNucci a immigré aux États-Unis et s’est installé à Pittsburgh en Pennsylvanie. Il connaît son antagoniste sur le bout des doigts. Il s’agit de « Unpredictable » Johnny Rodz, taulier de la Gleason’s Gym de Brooklyn, située juste en dessus du célèbre Brooklyn Bridge.
DeNucci a à peine le temps de déposer son blouson que Rodz lui tombe déjà dessus. Ils chutent ensuite sur la table des officiels, aidant ainsi à créer un climat de panique un peu délétère qui manque souvent à ces émissions. Dans son coin, Rodz délace les ficelles de la protection du coin mais comme souvent, l’arroseur finit arrosé et c’est bien Johnny qui goûte le métal de ce coin dénudé. Incroyable selling également, sur les coups de poing de DeNucci. C’est très simple mais qu’est-ce que ça fonctionne bien. DeNucci l’emporte en moins de cinq minutes avec un petit paquet. J’adore ces matches.
– Petite transition entre la fin de ce match et la coupure publicitaire, ce qui nous permet d’avoir quelques plans sur les différents types de publics présents ce soir – et comme tous les soirs – nous offrant un éventail de profils divers et variés. Images édifiantes d’un point de vue sociologique.
MATCH 6 : STAN « THE LARIAT » HANSEN W/FREDDIE BLASSIE VS JIM DUGGAN (02:58)
VAINQUEUR : STAN HANSEN
PRISE DE FINITION : LARIAT
APPRÉCIATION : INCROYABLE SQUASH DE STAN HANSEN
On reconnaît cette silhouette moustachue. Sous ses airs de monsieur tout-le-monde – plutôt baraqué ceci dit – se cache un futur grand Champion de la Mid-South Wrestling et patriote devant l’éternel en la personne de « Hacksaw » Jim Duggan. Mais ce soir, tout Duggan qu’il est, il ne fera pas long feu. Du moins je le pense. Parce qu’il rencontre Stan « The Lariat » Hansen, cowboy irascible et hors-la-loi virulent originaire de Borger au Texas.
Revigoré par l’un des passages au Japon les plus remarqués de l’histoire du Puroresu, le gaijin le plus célèbre de l’histoire du catch nippon n’a pas de temps à perdre et brutalise d’office le pauvre Duggan. Il n’y a qu’à écouter le son de ces coups de pied pour s’imaginer à quel point Hansen est sans retenue. Malgré toute sa bonne volonté et sa plein faculté à rester debout – ce qui n’a pas du déplaire à Hansen – Duggan finit décapité par une Lariat hallucinante de violence. Et en ressortant du ring, Hansen ne manque pas d’aller haranguer un groupe de fans un peu hostiles.
Semaine ma foi plutôt classique du côté de Championship Wrestling, qui fait toujours un peu mieux que All Star Wrestling mais sans faire de vagues non plus. Des brutes telles que Killer Khan, Ernie Ladd ou encore Stan Hansen, mais aussi de belles choses du côté de Tony Atlas ou encore de « Quickdraw » Ricky McGraw.
– Pas là depuis bien longtemps, Killer Khan a pourtant déjà marqué les esprits et pas qu’un peu. À la solde de « Classy » Freddie Blassie, le dangereux mongol se caractérise par une brutalité et une agressivité sans limites. Ce soir opposé au vaillant « Quickdraw » Rick McGraw, Khan a encore une fois frappé en blessant lourdement McGraw en dehors du ring, l’abattant de plusieurs descentes du genou mortelles.
– De retour sur ces terres après un passage remarqué du côté du Japon et de la All Japan Pro Wrestling de Giant Baba, le « Big Cat » Ernie Ladd s’est rapidement imposé comme un prétendant direct et aspirant numéro un au titre de Champion du monde, détenu par Bob Backlund – grand absent de ces programmes. Et sous la houlette d’Ernie Roth, Ladd a fait forte impression et a solidifié son statut de géant des ring, toujours derrière notre André national, cela va de soi.
Nathan Maingneur