MID-ATLANTIC CHAMPIONSHIP WRESTLING #37
10/07/1982
Bob Caudle et David Crockett sont nos hôtes et nous accueillent comme à l’accoutumée dans l’enceinte des WPCQ-Studios de Charlotte en Caroline du Nord à l’occasion de cette édition de Mid-Atlantic Championship Wrestling, le programme phare des Jim Crockett Promotions en cette année 1982.
– Cela fait maintenant plusieurs semaines que Roddy Piper a pris en otage la ceinture de Champion du monde de la promotion, officiellement toujours détenue par Jack Brisco. Crockett nous annonce d’entrée de jeu, alors que Piper les a rejoints, qu’il lui propose la somme de 10,000 dollars afin que le Hotrod daigne monter sur le ring. Roddy compte les billets et remarque que le compte n’est pas bon. Wahoo McDaniel et Ricky Steamboat s’invitent sur le plateau et ont retiré l’argent qu’il lui manque car eux aussi souhaiteraient que Piper défende ce fichu titre ! Après un court moment d’hésitation – billets en main – le Hotrod accepte la proposition mais pose d’autres conditions.
De retour de la page publicitaire, Piper confie l’argent à un arbitre – menaçant au passage de le tuer s’il bouge d’un iota – et nous offre une promo d’avant-match absolument folle. Ses conditions sont les suivantes : Roddy exige que Wahoo et Steamboat quittent la salle et ajoute que s’ils ne posent ne serait-ce qu’un orteil dans ces studios, il remporterait alors automatiquement le match. Conditions une fois encore acceptées, mais Crockett l’intime maintenant à rejoindre le ring.
MATCH 1 : MID-ATLANTIC HEAVYWEIGHT TITLE MATCH : JACK BRISCO © VS « ROWDY » RODDY PIPER (15:07)
VAINQUEUR : « ROWDY » RODDY PIPER
PRISE DE FINITION : ROLL OF COINS PUNCH
INDICATEUR : **** ½
Toutes les conditions étaient donc réunies pour que « Rowdy » Roddy Piper accepte enfin de remettre ce titre en jeu. Ce titre qu’il n’a d’ailleurs jamais gagné et qui appartient donc – jusqu’à preuve du contraire – à son propriétaire, en la personne de Jack Brisco. Agressé et provoqué à de trop nombreuses reprises, Brisco a le regard des mauvais jours. On s’en souvient d’ailleurs très bien, le Hotrod s’en était pris à Jay Youngblood et à Ricky Steamboat mais pire encore, à son petit frère Jerry, encore blessé à la jambe.
Les premiers contacts sont hyper nerveux et cela n’est guère étonnant lorsqu’on sait tout ce qui a mené à ce combat. Brisco prends l’avantage psychologique avec un Armdrag qui projette Piper en dehors du ring. Tels deux lutteurs amateurs, ils se livrent ensuite à un véritable duel de gréco-romaine. Et alors qu’on pensait que Brisco s’en sortirait tout naturellement, Piper étonne de technicité mais Brisco le sèche avec un énorme coup de la corde à linge et prends le large. Et cet avantage, Brisco le conserve d’une poigne de fer. Et c’est là tout le talent de Jack Brisco, vétéran des rings invétéré, qui arrive à nous passionner avec un collier arrière de cinq minutes. Car de ce combat qui dure quand même près d’un quart d’heure, ne ressort aucune extravagance ni aucune fioriture. Tout se passe dans un sens du détail purement minimaliste. Le front en sang, à cause d’on-ne-sait-trop quoi, Piper passe de peu de l’emporter avec sa Sleeper Hold, si ce n’était pour la résilience de Brisco, qui serre les dents. Et qui place à son tour le Hotrod dans une prise du sommeil, de laquelle ce dernier nous offre une série de visuels saisissants. L’air hagard, l’écume au coin de la bouche, Piper gesticule frénétiquement et s’accroche pour ne pas s’évanouir. Tombé en dehors du ring, Piper glisse discrètement quelque chose dans sa main et décoche une droite du tonnerre à un Jack Brisco qui s’écroule net. L’arbitre n’y voit que du feu et compte 1..2.. et 3. Mais c’est pas vrai ! Malgré toutes ces conditions, Piper a quand même trouvé le moyen de gagner en trichant. Et donc de remporter ce fichu titre ! On réalise alors qu’il s’agissait d’un rouleau de pièces que Piper maintenait fermement dans sa main. Oh le fils de…
– Dans un état second, transi et désorienté, Piper attrape le pognon et en met dans sa bouche comme un fou. Comme s’il n’y croyait pas lui-même, il attrape Caudle par la cravate et lui demande d’annoncer sa victoire, en pleine crise d’hystérie. Hors de lui Piper, repart au vestiaire alors que Ricky Steamboat et Wahoo McDaniel ont rejoint les abords du ring pour aider Brisco à se remettre sur pieds. Quel incroyable début d’émission !
Remis de ses émotions, Bob Caudle reçoit maintenant King Parsons en plateau. Interrogé à propos de cette fin de match complètement folle, Parsons semble plus ou moins justifier les moyens employés par Piper. Parsons clame s’être entraîné durant plusieurs années et dit avoir lutté aux quatre coins du globe pour qu’il puisse aujourd’hui se mesurer aux meilleurs étalons de ce territoire, comme Angelo « King Kong » Mosca ou encore le Sgt. Slaughter qu’il doit affronter dans quelques instants.
MATCH 2 : SGT. SLAUGHTER VS KING PARSONS (05:07)
VAINQUEUR : SGT. SLAUGHTER
PRISE DE FINITION : SLAUGHTER CANNON
INDICATEUR : **
À nouveau Champion des États-Unis, le Sgt. Slaughter apparaît avec la gueule en vrac et semble être dans un sale état. On nous apprend en effet que le sergent a le nez cassé et un œil au beurre noir des suites d’un combat éprouvant disputé contre Wahoo McDaniel. Il affronte ce soir King Parsons, qui aurait tout à gagner d’une victoire contre ce compétiteur aguerri – que dis-je – contre l’actuel Champion des États-Unis. Du côté du plateau, nous entendons que Sir Oliver Humperdink a rejoint Caudle aux commentaires.
Slaughter s’impose le premier grâce à sa force de frappe militaire mais Parsons réplique avec le même type d’offense pour montrer au sergent de quel bois il se chauffe. Slaughter le calme cependant avec d’énormes baffes qui claquent dans toute la salle. Parsons reprends alors l’avantage avec un gros surpassement mais le sergent reste sur ses gardes. Pour être honnête, Parsons m’impressionne car il fait ce soir preuve d’une résilience remarquable. Il en prends plein la gueule mais ne perd pas sa niaque ni son envie de remporter ce combat. Finalement, et après avoir donné tout ce qu’il avait en lui, Parsons succombe à la Lariat du sergent, sa fameuse Slaughter Cannon portée à la suite d’une sorte de Spear en plein air. Et oui vous avez bien lu, un Spear en plein air du Sgt. Slaughter.
– De retour en plateau avec sa ceinture et avec 10,000 dollars de plus en poche, Roddy Piper est reçu par Bob Caudle. Le Hotrod célèbre sa victoire et harangue encore Jack Brisco juste avant d’accueillir le Sgt. Slaughter. Le sergent le félicite pour sa victoire et se réjouit du fait qu’ils possèdent ces titres. La gueule en vrac, Slaughter s’adresse à Wahoo McDaniel et lui promet que la prochaine fois qu’il aura affaire à lui, sa femme devra mettre des lunettes 3D pour le reconnaître. Original comme punchline.
MATCH 3 : GREG « THE HAMMER » VALENTINE VS KEITH LARSON (03:37)
VAINQUEUR : GREG VALENTINE
PRISE DE FINITION : DESCENTE DU COUDE
APPRÉCIATION : TRÈS BON MATCH DE VALENTINE
Au retour de la coupure publicitaire, nous découvrons que Greg « Hammer » Valentine est sur le ring, prêt à se battre. Vêtu d’une scintillante robe de ring bleue, Valentine a effectué son retour sur la semaine dernière et n’a pas perdu de temps pour faire valoir ses intentions. Il rencontre ce soir l’un des jobbers les plus prometteurs de ce territoire en la personne de Keith Larson, qui fut entraîné par Gene et Ole Anderson au tout début de sa carrière.
D’entrée de jeu, Valentine se laisse surprendre par le jeune Larson mais garde la tête froide. Méthodique et mesuré, Valentine se ressaisit rapidement mais reste tout de même sur ses gardes. Il reprends finalement les rennes de la rencontre avec ses coups de poing qui sonnent comme des coups de marteau, ainsi qu’avec tout un éventail de Suplexes aussi meurtrières les unes que le autres. Dès lors, la machine Valentine est lancée et ce pauvre Larson subit plus qu’autre chose le catch du fiston de Johnny Valentine, un catch dur et sans fioritures. Courageux, le pauvre garçon essaie de revenir, mais Valentine l’assomme avec un sale coup de coude et en termine en moins de quatre minutes avec sa descente du coude fatale.
– De retour sur le plateau, Caudle accueille Greg Valentine qui revient sur ses derniers accomplissements au Nord-Est des États-Unis du côté de la World Wrestling Federation, notamment face à Bob Backlund. Valentine rappelle qu’il a brisé la jambe de Wahoo McDaniel et s’adresse ensuite au Champion du monde en titre de la NWA en la personne du « Nature Boy » Ric Flair. Tiens donc…
MATCH 4 : RICKY STEAMBOAT & JAY YOUNGBLOOD VS BILL WHITE & ALI BEY (03:29)
VAINQUEURS : RICKY STEAMBOAT & JAY YOUNGBLOOD
PRISE DE FINITION : MILITARY PRESS SLAM
APPRÉCIATION : PLUTÔT BON MATCH À QUATRE
Du catch à quatre pour conclure ce programme, c’est tout ce qu’on pouvait espérer de la part de la promotion qui tait toujours les avancées de son propre tournoi Tag Team qui semble en fait n’avoir jamais existé. Sur le ring, nous retrouvons ce formidable tandem composé de Ricky Steamboat et de Jay Youngblood, deux des catcheurs les plus populaires et les plus athlétiques du moment. Ils se frottent à un duo de jobbers composé de Ali Bey et de Bill White, deux gaillards de plutôt bonne constitution.
Steamboat et Youngblood s’imposent avec style mais White et Ali Bey font preuve d’une certaine efficacité. Mention toute particulière à la puissance de Steamboat qui porte Bill White à bout de bras pour une série de brise-dos. Bey contre un Splash de Steamboat et le coince en prise de l’ours, avant de le jeter sur sur le genou de White pour un brise-dos, une variation de prise que je n’ai jamais vue. Steamboat se redonne du poil de la bête et avec le concours de Jay Youngblood, il l’emporte ensuite rapidement avec une sorte de Military Press Slam porté en duo.
– De retour en plateau, Bob Caudle reçoit Wahoo McDaniel pour clôturer ce programme. Interrogé à propos de ce qu’il s’est passé ce soir, Wahoo a l’esprit revanchard. Jack Brisco les rejoint et regrette d’avoir perdu de l’argent mais le plus important pour lui est de regagner sa ceinture, qui représente bien plus qu’une somme d’argent, aussi importante soit-elle.
Une semaine historique pour la Mid-Atlantic Championship Wrestling, marquée par l’un des matches les plus importants de son histoire et sans doute aussi l’un des meilleurs à la TV de l’année 1982. Sgt. Slaughter a la gueule cassée, Greg Valentine défie le « Nature Boy » Ric Flair et Rowdy » Roddy Piper arrache à Jack Brisco sa ceinture de Champion du monde, non sans controverse.
– Officiellement de retour sur ce territoire depuis une semaine, Greg « Hammer » Valentine n’a pas perdu de temps pour rappeler qu’il est un prétendant plus que légitime à n’importe quel titre de Champion du monde. Et quel Champion du monde Greg Valentine a-t’il décidé de provoquer, une semaine après son retour sur le territoire des Carolines. Nul autre que le « Nature Boy » Ric Flair en personne avec qui il a déjà croisé le fer à de nombreuses reprises. Il nous tarde désormais d’attendre la réponse du Champion.
– N’ayons pas peur des mots. 1982 est l’année de Roddy Piper. Tout, et je dis bien tout ce que touche « Rowdy » Roddy Piper se transforme en or. Invraisemblable au micro, inimitable sur le ring, Piper marche sur l’eau. Et au-delà de ce combat face à Jack Brisco – qui sera le sujet de notre prochain point – le Hotrod possédait déjà une heat conséquente, fruit de semaines et de mois passés à s’en prendre aux Brisco Brothers, à blesser son frère et ses amis. Mais d’ainsi faire toutes ces manières, d’exiger toutes ces conditions pour ne serait-ce que monter sur le ring pour finalement l’emporter avec un rouleau de pièces caché dans sa main… Ne passons pas par quatre chemins, Roddy Piper est – sans contestation possible – le heel numéro un du monde du catch à cette période.
– Et ce match… nom de dieu ce match de catch. Parce que c’est de quoi il s’agit, purement et simplement. Un putain de match de catch. Près d’un quart d’heure de combat au terme duquel cet enfoiré de « Rowdy » Roddy Piper a remporté – non sans controverse – le titre de Champion du monde des poids-lourds de la Mid-Atlantic Championship Wrestling en l’arrachant à Jack Brisco. Ce même Jack Brisco qui nous aura prouvé, si cela était encore nécessaire à ce stade de sa légendaire carrière, qu’il est l’un des plus grands techniciens des rings de l’histoire de ce sport-spectacle.
Nathan Maingneur