MID-SOUTH WRESTLING #14

20/03/1982

Boyd Pearce est notre hôte et nous accueille dans l’enceinte du Irish McNeil’s Boys Club de Shreveport en Louisiane. À côté de lui est assis un jeune garçon, qui semble timide et réservé. Il s’agit d’un certain Jim Ross, que Boyd Pearce ne laisse pas réellement parler si ce n’est pour nous dire que les plus grands stars du catch sont à la Mid-South Wrestling. Et déjà, Ross possède ce ton et cette diction inspirée des commentaires de Gordon Solie, que Jim Ross ira magnifier lors des prochaines décennies.

– Pearce nous annonce que c’est Paul Orndorff qui a obtenu ce match pour la ceinture de Champion nord-américain de Ted DiBiase. Et comme cela fut stipulé en amont, Bob Roop sera banni des abords du ring. Offusqué par ce jeu du sort, Roop fait irruption en plateau et demande à ce que la décision soit annulée, prétextant qu’Orndorff n’est même pas ici ce soir. Pearce assure n’être capable d’aucune prise de décision et le renvoie du côté de Grizzly Smith, le matchmaker de la promotion.

On nous diffuse à présent des images exclusives et quelque peu étranges de l’opération subie par Ernie Ladd à la suite de sa blessure au genou. Si j’en crois ma mémoire, c’est la première fois que de telles images, purement médicales, sont diffusées, au moins pour la Mid-South Wrestling. On nous repasse à nouveau l’interview que le « Big Cat » Ernie Ladd a accordé a Reeser Bowden ainsi que les images de l’agression à l’origine de sa blessure. On nous remontre également les images de la blessure infligée à Dick Murdoch, cette fois encore du fait de cet imposant personnage.

MATCH 1 : ONE MAN GANG W/SKANDOR AKBAR VS BUDDY LANDEL (01:29)

VAINQUEUR : ONE MAN GANG

PRISE DE FINITION : SPLASH

APPRÉCIATION : PLUTÔT BON SQUASH

Et cet imposant personnage nous gratifie ce soir de ses débuts en solo. Accompagné par ce diable de Skandor Akbar, ce très grand gaillard n’est autre que le One Man Gang, alors seulement âgé d’une vingtaine d’années. Nous le connaissions avec son iroquois, le One Man Gang affiche ce soir une longue chevelure brune et une barbe fournie. Il se mesure à Buddy Landel, pas franchement rassuré à l’idée de se frotter à ce géant.

Prenant de la vitesse en se projetant dans les cordes, Landel se heurte très rapidement à un obstacle de taille, et c’est peu dire. De manière pas franchement académique, le One Man Gang s’impose avec un énorme enfourchement et l’emporte en moins d’une minute et trente secondes avec un gigantesque Splash. Au moins ce fut efficace.

MATCH 2 : BOB ROOP VS KILLER KARL KOX (02:00)

VAINQUEUR : KILLER KARL KOX

PRISE DE FINITION : BRAINBUSTER

APPRÉCIATION : HUMILIATION TOTALE !

À l’origine, c’est ce pour quoi Bob Roop a signé. Si Paul Orndorff a en effet bien obtenu le droit d’affronter Ted DiBiase pour sa ceinture de Champion nord-américain, Bob Roop se mesure ce soir à un défi d’un tout autre acabit. Effectuant son entrée au son de « Here Comes The Judge » de Shorty Long, Killer Karl Kox reçoit une superbe ovation de la part du public de Shreveport. Dernière chance, Roop s’empare du micro de Reeser Bowden, mais rien n’y fait, personne ne peut arranger sa situation.

Et alors que Karl Kox retirait son blouson de l’armée, ce dernier est agressé par Roop, qui le martèle avec de gros coups de coude. Toutefois, ce vieux briscard en vu d’autres et ne se laisse pas faire. Karl Kox répond avec ses coups de coude et repousse Roop dans ses retranchements. Comble de l’humiliation, Karl Kox l’emporte en seulement deux courtes minutes avec son Brainbuster, qui ressemble plus à une simple souplesse arrière qu’autre chose. L’humiliation est totale.

MATCH 3 : THE SAMOAN WARRIORS W/SKANDOR AKBAR VS JESSE BARR & TERRY GIBBS (03:43)

VAINQUEURS : THE SAMOAN WARRIORS

PRISE DE FINITION : SAMOAN DROP

APPRÉCIATION : SQUASH TRÈS SOLIDE DES CHAMPIONS

Inamovibles Champions Tag Team depuis que Skandor Akbar a remplacé Ernie Ladd, Afa et Sika, anciens Champions par équipes de la World Wrestling Federation, continuent de semer la terreur et le trouble. Sans réels challengers (pour l’instant), les Samoans ne sont pas inquiétés outre mesure. Face à eux ce soir, un frêle duo composé de Jesse Barr et de Terry Gibbs, qui s’apprête à passer un sale quart d’heure.

Attention toutefois à ne pas sous-estimer Jesse Barr. Frère du légendaire Art Barr, illustre inventeur du Frog Splash, Jesse n’est pas en reste et a le catch dans le sang. Il surprends Afa avec un saut chassé et manque de l’emporter avec un petit paquet. Toutefois, l’effort est de bien trop courte durée et les Samoans prennent rapidement le contrôle du combat avec de sévères atémis, parfaitement vendus par Barr. Celui-ci est un excellent « seller », c’est à dire qu’il sait parfaitement rendre les coups et les prises de ses adversaires. Gibbs n’arrange pas les choses et succombe plutôt rapidement à un Samoan Drop en l’espace de quatre minutes. L’affaire est pliée, et comme d’habitude, les Samoans ressortent forts de cet affrontement.

– Il est l’heure. Fier Champion nord-américain au courage sans faille, Ted DiBiase se tient sur le ring et attends d’être rejoint par l’homme qui a été tiré au sort pour l’affronter, en la personne de Paul Orndorff. Sauf que celui-ci ne semble pas être présent ce soir, et c’est nul autre que Bob Roop qui ira le remplacer, ses plaintes et ses jérémiades semble donc avoir payé !

MATCH 4 : NORTH AMERICAN TITLE MATCH : TED DIBIASE © VS BOB ROOP (07:04)

VAINQUEUR : BOB ROOP

PRISE DE FINITION : FIGURE FOUR LEGLOCK

INDICATEUR : ***

Cela semble donc être officiel, c’est bel et bien Bob Roop qui ira prendre la place de Paul Orndorff face à Ted DiBiase. Le Champion ne semble pas déstabilisé outre-mesure par ce revirement et affiche un ton déterminé. Depuis sa victoire face à ce même Paul Orndorff, lui et Roop lui ont tourné autour comme une bande de vautours. Et ce soir, peut-être que Bob Roop pourrait s’arroger sa ceinture, bon courage à lui.

Car en effet, Roop souffre déjà d’une humiliante défaite et sans doute d’un sérieux mal de tête à cause de ce Brainbuster. DiBiase le sait, parce que le Champion est intelligent. Ce dernier ne retient pas ses coups et allume Roop à coups de coude et d’avant-bras dans le crâne. Roop semble complètement désabusé et apparaît en totale perdition pour ce qui se révèle être une promenade de santé pour le Champion nord-américain. Roop n’est pas non plus humilié et sait placer un sale coup de poing fermé de temps à autre. Roop relève son épaule à la suite d’un gros Powerslam alors que le public semble retenir son souffle. D’une seconde à l’autre, DiBiase place sa Figure Four Leglock, mais ce qu’oublie DiBiase, c’est que Roop sait contrer la prise, et retourne donc la pression ! DiBiase s’en sort, mais lorsqu’il tente de replacer sa prise, Roop le dégage avec force et dans sa chute, DiBiase percute l’arbitre, qui chute hors du ring. Et là, nul autre que le One Man Gang accourt au ring et s’en prend à DiBiase. Il lui éclate alors la jambe contre le poteau et repart aussitôt en direction des vestiaires. DiBiase est blessé, et Bob Roop s’engouffre dans cette faille. Il lui inflige sa propre prise et, tordu de douleur, DiBiase s’évanouit. L’arbitre, revenu à ses esprits, fait alors sonner la cloche. La réaction du public est sans équivoque, mais le fait est que Bob Roop est notre nouveau Champion nord-américain. Soirée sauvée.

MATCH 5 : JUNKYARD DOG & MR. OLYMPIA VS TULLY BLANCHARD & MIKE BOYER (00:49)

VAINQUEURS : JUNKYARD DOG & MR. OLYMPIA

PRISE DE FINITION : POWERSLAM

APPRÉCIATION : LES VOILÀ NOS PROCHAINS CHAMPIONS !

Sur le ring, un duo formé pour l’occasion patiente sagement en attendant l’entrée de leurs antagonistes. Aux côtés du jobber Mike Boyer, on reconnaît un tout jeune Tully Blanchard, qui effectue donc sa première apparition télévisée sur ce territoire. Originaire de la ville de San Antonio et fils du promoteur de Joe Blanchard, Tully ira connaître une grande carrière sur les rings des territoires. Leurs adversaires effectuent leur entrée au son de « Another One Bites The Dust » de Queen et forment un tandem plus qu’intéressant.

Et sans perdre une seule seconde, le Junkyard Dog et Mister Olympia se jettent corps et âme dans la bataille, au grand bonheur du public de Shreveport. Boyer est littéralement monté en l’air par JYD qui l’écrase au sol avec un énorme enfourchement. Et en moins de temps qu’il n’en a fallu pour monter sur le ring, Mister Olympia et JYD l’emportent grâce à un Powerslam du Dog sur ce pauvre Boyer. Quelle efficacité !

– Et alors que Boyd Pearce s’apprêtait à rendre l’attente, il est rejoint par un Paul Orndorff visiblement en rogne. Orndorff nous apprends que sa voiture n’a pas pu démarrer, et qu’il a d’abord cru que c’était DiBiase derrière tout ça. Orndorff nous informe que c’est lui qui a planifié l’attaque du One Man Gang. Et cerise sur le gâteau, Orndorff nous apprend que lorsqu’il est finalement arrivé dans la salle, il n’a pas pu s’empêcher de fouiller dans le sac de Bob Roop et a trouvé les bougies d’allumage de sa voiture ! C’était donc lui !

Quel épisode de Mid-South Wrestling ! Et quelle histoire racontée autour de Paul Orndorff et de Bob Roop. Ce dernier nous a d’abord fait croire que ce soir allait être le soir le plus humiliant de sa carrière, mais tout était calculé ! Ajoutons à cela les débuts du One Man Gang, de Tully Blanchard et de Jim Ross !

– Il a éclaté le genou d’Ernie Ladd et les côtes de Dick Murdoch. Et pourtant, ce géant n’a encore jamais combattu entre quatre cordes. Jusqu’à ce soir, date à laquelle le One Man Gang a donc officiellement effectué ses débuts. Démolissant ce pauvre Buddy Landel, le One Man Gang a fait forte impression. C’est son manager, en la personne du diabolique Skandor Akbar, qui doit s’en réjouir.

– La soirée partait terriblement mal pour Bob Roop. Tel que cela était amorcé, Roop aurait du se contenter d’une humiliante défaite face à Killer Karl Kox. Toutefois, ses jérémiades et ses plaintes ont payé : Bob Roop a réussi le plus grand coup de sa carrière en prenant la place de Paul Orndorff face à Ted DiBiase. Et coup du sort, l’ancien lutteur amateur de Blacksburg en Virginie a pu bénéficié d’un petit coup de pouce inattendu et a pu s’arroger la ceinture de Ted DiBiase. Le destin offre parfois de belles choses.

– Le hasard fait bien les choses, mais parfois, dans des rares situations, c’est peut-être un peu plus que le hasard. Contrairement à ce qu’a martelé Bob Roop, Paul Orndorff n’a pas manqué son match, non non non. Arrivé en toute fin d’émission, Orndorff s’est en réalité rendu compte que c’est Bob Roop en personne qui est responsable de son absence, ce même Bob Roop qui a remporté la ceinture de Ted DiBiase grâce au coup fourré que lui, Paul Orndorff, a mis en œuvre. Le hasard fait bien les choses, mais la vengeance est une p*te, et Bob Roop s’en rendra compte tôt ou tard.

– Surtout, ce programme a marqué les débuts de Jim Ross en tant que commentateur de catch. Ce jeune garçon timide et réservé ne le sait pas encore, mais sa voix rauque et ses commentaires passionnés deviendront la bande-son originale des plus grands combats de l’histoire de ce sport-spectacle pour de très longues années encore.

Nathan Maingneur